Rebellion Toyota : Non au moteur 4 litres ! Imprimer Envoyer
Dimanche, 02 Octobre 2011 18:55

Petit Le mans 2011 Rebellion_12S'il est un team dont on attend beaucoup, c'est bien le Rebellion Racing. Par son alliance avec Toyota, l'équipe helvético-anglaise laisse espérer un futur retour officiel au Mans du géant japonais. Mais dans une période difficile pour l'industrie automobile, pour qu'un tel retour soit possible, il faudrait au minimum assurer les dirigeants nippons d'une réelle stabilité réglementaire. L'on sait déjà que le règlement mis en place cette année sera obsolète en 2014. Mais Auto-Hebdo, dans son édition de la semaine dernière, annonçait que des moteurs de 4 litres pourraient être acceptés en LMP1 essence dès l'année prochaine. Un changement majeur qui interviendrait mois d'un an après la mise en place de la réglementation des moteurs limités à 3,4 litres... Un changement qui pourrait éventuellement être sans conséquence majeure pour des constructeurs tels que HPD ou Zytek qui possèdent déjà un 4 litres simplement extrapolé de leur 3,4 litres. Mais dans le cas de Toyota, c'est moins simple... Entretien avec Stephan Gervais, le responsable marketing et communication de Rebellion Racing.

Stephan, peux-tu nous éclairer un peu sur cette possible arrivée des moteurs 4 litres ?

« Il y a eu une proposition de la commission mixte FIA-ACO destinée à faire perdre de la puissance aux diesels mais il semble qu'elle ait été refusée par les constructeurs, au moins en partie. Pour compenser, on nous a effectivement soumis l'idée de passer à une cylindrée de 4 litres ce qui nous permettrait effectivement de gagner un peu en couple, voire en puissance. Mais cela ne nous intéresse pas et nous n'y sommes pas favorables. Pourquoi serait-ce encore à nous de faire l'effort financier ? Déjà avant Le Mans, c'est à nous que l'on a attribué, en dernière minute, des brides plus grosses. Ce n'est pas les diesels que l'on a freiné, ce sont les essence que l'on a voulu booster. Mais nous n'avions pas pu utiliser ces brides Nous n'avions pas le temps de les utiliser sans risques.

Toyota dispose effectivement d'un moteur de 4 litres. Il s'agit de celui utilisé en Super GT. Mais pour l'adapter dans la voiture, il nous faut encore faire des modifications du châssis car ce n'est pas le même bloc que le 3,4 litres. Alors effectivement, nous allons peut-être gagner un peu en puissance mais les usines, elles, vont également largement progresser cet hiver. Et l'écart entre eux et nous n'aura peut-être pas beaucoup évolué. L'argent lui, aura été investi dans ce changement de moteur au détriment d'autres domaines. Le tout pour deux ans maximum puisqu'un nouveau règlement est prévu en 2014... Il nous est impossible d'accepter cela. Sans compter que nous sommes déjà en octobre et qu'il est peut-être un peu tard pour faire de telles modifications sur nos voitures. »

Comment prend-on de tels louvoiements réglementaires du côté de Toyota ?

« Ils n'apprécient pas, c'est clair. Les japonais ont besoin de stabilité dans la durée, de confiance dans celui qui tient la barre. Ils ne sont pas partisans des mouvements de lobbying, ce n'est pas dans leur culture. Ils pourraient annoncer, comme d'autres, nous reviendrons avec des si... Si le règlement nous convient puis faire pression ensuite pour que cela aille dans leur sens. Mais ils ne le feront pas. C'est un comportement typiquement européen. »

Le nouveau WEC (Championnat du Monde d'Endurance) vous intéresse-t-il ?

« Au début, nous nous sommes dits comme tout le monde. C'est super, c'est ce qu'il nous manquait. En plus, cela aurait du sens pour nous d'y participer, ce serait la suite logique de notre démarche. Nous avons commencé en Le Mans Series en LMP2 en terminant vice-champions. Puis nous sommes passés en LMP1. Nous y avons gagné le titre également cete année. Nous avons aussi suivi le mouvement de l'ILMC, le WEC est donc le chemin tout tracé. Mais aujourd'hui, on se pose la question. Y aller sans avoir de chance réelle de jouer la victoire ? Y aller pour faire le nombre ? Sans la moindre reconnaissance des organisateurs ? Songez que cette année, nous n'avons jamais été associés à une démarche promotionnelle de l'ILMC. Malgré nos moteurs Toyota... Certes, nous sommes européens et le WEC axé tout de même autour de l'Europe nous intéresse, évidemment. Mais nous devons y trouver notre compte et non simplement apporter un joli complément au plateau.

Et puis, il serait peut-être temps de nous communiquer un calendrier. Nous en avons impérativement besoin. Nous sommes en pleine période de rencontre avec d'éventuels partenaires. Nous en avons un nouveau ici, à Petit Le Mans. Il vient ce week-end. Mais je lui dis quoi pour l'avenir. Nous participons au WEC mais nous ne connaissons pas le calendrier, donc je n'ai pas non plus de budget prévisionnel. Si l'on nous communique le calendrier à Zhuhai comme cela a été dit, c'est au panneau trop tard. Beaucoup trop tard... »

Avec l'American Le Mans Series qui accepte toujours les LMP1, contrairement aux LMS, et qui en manque, vous pourriez trouver un débouché. De plus, le calendrier est connu maintenant et l'ALMS a obtenu un peu plus de souplesse de la part de l'ACO pour ajuster ses règlements techniques aux particularités américaines. Cela vous intéresse ?

« Oui, clairement, on y pense. On sait que nous y serions accueillis à bras ouverts par les organisateurs. On sait que nous serions en mesure, non plus de jouer une belle 5ème ou 6ème place dans le ventre mou du championnat, mais de jouer la victoire. Ca change l'approche... »

Mais est-ce réalisable sur le plan logistique pour un team européen ?

« Oui, ça l'est. Evidemment, cela signifie que nous devrions implanter une base ici. Mais dès que l'on commence à évoquer l'idée dans le paddock, on s'aperçoit que l'on pourrait vite trouver des solutions avec des équipes locales pour partager des locaux par exemple. Les solutions existent. »

Vos partenaires vous suivraient-ils dans une telle aventure ?

« Pour nos partenaires, que nous courrions à Shangaï, Sao Paulo ou ici aux USA, c'est la même chose... L'essentiel est avant tout qu'ils aient des retombées médiatiques. Malgré tout, pour nous, cela constituerait tout de même une expatriation. Nous sommes européens avant tout et participer au WEC reste notre premier choix. Mais pas à n'importe quel prix... »

Petit Le mans 2011 Rebellion_12Depuis cet entretien, la Lola-Toyota n°12 a décroché la 5ème place du Petit Le Mans, la troisième des essence. Un accrochage entre Andrea Bellicchi et Rob Kaufman (déjà impliqué dans l'accident de Rockenfeller au Mans) a ralenti une course pourtant lancée sur de très bons rails, une course terminée devant tous les teams américains engagés en proto. De quoi donner à réfléchir...

Laurent Chauveau