Le Salon de Genève bat son plein, apportant son lot de nouveautés dans le monde de la grande série. Mais il apporte aussi sa part de frisson aux fans d'endurance ce à quoi nous sommes habitués. Après la 908 HYbrid4 dévoilée hier par Peugeot Sport, c'est au tour d'Aston Martin de lever le voile sur sa toute nouvelle LMP1, l'AMR-One. Hier mardi, sous forme de teasing, une petite image de la face avant avait été dévoilée. Voici donc maintenant l'intégralité de l'auto révélée ! L'on savait que l'auto serait propulsée par un moteur essence mais on sait maintenant qu'il s'agira d'un 6 cylindres en ligne de 2000 cm³ turbo-compressé à injection directe et à 4 soupapes par cylindre. Voilà un choix qui renvoie à ce que fait traditionnellement BMW et qui peut surprendre, un 6 en ligne étant par principe assez long. Mais l'empattement, inférieur à celui de 908 (2930 mm contre 2950 mm) prouve que le bloc AMR reste assez compact. La position du pilote, qui semble extrèmement reculée (pour un meilleur centrage des masses ?), confirme cette compacité. La boite de vitesses Xtrac à 6 vitesses est transversale.

Un seul banc de cylindres signifie un seul turbo placé du côté droit de la voiture Ainsi qu'une seule sortie d'échappement (située en position haute en amont de l'aileron comme la Peugeot 908 ou l'Audi R15). Voilà qui explique la petite asymétrie de la carrosserie. Reste que l'on ne connait pas la réelle fonction des deux snorkels, asymétriques eux aussi, l'un placé sur l'aile arrière droite, l'autre au centre de l'auto entre les deux arceaux. Mystère, étant donnée la position de l'échampement, on se demande à quoi peut donc bien servir ce "tube" d'extraction d'air situé sous l'aileron de requin et débouchant sous l'aileron ?

Une étude rapide des images laisse à penser que la voiture, comme la précédente Lola Aston Martin, a avant tout été étudiée en fonction du Mans en favorisant la trainée. La forme des pontons en vue de profil rappelle d'ailleurs l'ainée en conservant une ligne supérieure semblable et qui reste très haute, soit l'inverse de ce que fait l'ensemble de la concurrence. A l'arrière sous l'aileron, la forme du capot semble peu agressive et donc moins chercheuse d'appuis que de réduction de la trainée. La face avant est extrèmement perméable, percée de deux grands trous de part et d'autre d'un nez placé très haut et coincé entre des ailes larges. Car comme les tenants du diesel ou Acura deux années plus tôt, George Howard Chappell, le directeur technique d'Aston Martin Racing, a choisi lui aussi les pneus larges à l'avant. Malgré tout, cette face avant conserve une certaine élégance qui tient beaucoup aux galbes généreux. Par contre, les pontons, plats comme on n'en voit plus nul part, sont beaucoup moins glamour. L'arrière tombant ne réhausse pas l'esthétique de l'ensemble, même si globalement, l'Aston est plus élégante, aux yeux de votre serviteur, que la R18 d'Audi.

Revenons aux pontons pour signaler qu'ils sont très largement ajourés même si ils ne sont pas coupés en deux. Ce qui diffère aussi de la concurrence, c'est la position très reculée là encore de ces évents ce qui souligne certainement, là encore, la volonté de gérer au mieux la trainée. Décidément, cette Aston AMR-One est bel et bien unique... Et ce même si son aileron arrière est soutenu, comme sur la R18, par un seul mat central aligné sur (et caché par...) la dorsale réglementaire. Difficile d'en dire beaucoup plus sur le plan technique au vu de ces images.

Cependant, il faut encore aborder l'aspect sportif et, déception qui était cependant très prévisible, la belle ne sera pas à Sebring du fait de sa présentation extrèmement tardive mais débutera en course au Peul Ricard en Le Mans Series. Ses premiers tours de roue doivent intervenir dans les jours à venir. Une voiture disputera ensuite l'intégralité de la saison en ILMC, la seconde ayant un programme à la carte, encore à définir. Six voitures seront construites au total. Toujours est-il que tout cela est extrèmement tardif et l'on se demande ce qui a bien pu retarder à ce point la décision de David Richards de lancer le projet provoquant une course contre la montre effrenée de l'équipe pour tenir les délais. il ne va pas falloir subir, comme Peugeot en fait la dure expérience avec 908, trop de sorties de piste destructrices au cours des essais pour les hommes d'AMR...

5 des 6 pilotes sont d'ores et déjà connus. Darren Turner et Stefan Mücke seront associés sur la 007 tandis que Harold Primat, Adrian Fernandez et Andy Meyrick seront au volant de la 009. Si il n'y a rien à redire pour ce qui concerne les deux premiers, pour le trio de la seconde, on n'est pas là au niveau de Peugeot ou Audi. C'est là la preuve que Aston Martin Racing demeure une entité aux moyens plus faibles qu'Audi ou Peugeot et que même au niveau des équipages, il faut faire certains sacrifices financiers. Si le troisième pilote de la 007 est un top-gun alors, on pourra tout de même comparer frontalement les performances de la AMR-One aux R18 et 908. Etant donné que la nouvelle née semble beaucoup ne plus réellement donner dans le compromis marketing-efficacité, on peut penser qu'elle sera tout de même une redoutable concurrente. George Howard-Chappell l'appelle de ses voeux. Nous de même...

Laurent Chauveau