Le Mans 66 vu par Hollywood ! Imprimer Envoyer
Samedi, 09 Novembre 2019 10:22

Le_Mans_66_004Enfin ! Depuis le temps qu'on nous en parle, "Le Mans 66" était hier enfin dans les salles en avant-première. Je n'ai pas pu attendre la réelle sortie de mercredi prochain, je me suis rué au ciné. Volontairement, je n'avais pas trop "révisé" cette course avant d'aller voir le film. Je connais suffisamment Hollywood et ses approximations historiques pour me méfier. Je préférais ne pas connaître à fond la vraie histoire pour ne pas être trop choqué par celle qu'on allait me montrer. D’autant que je la connais déjà plutôt bien pour une course que je n’ai évidemment pas vue. En 1966, j’avais -2 ans ! J'avoue que j'étais toutefois vraiment impatient de découvrir ce film notamment pour la reconstitution d’une époque qui fait rêver. Mais le sport auto n'ayant pas toujours fait bon ménage avec le cinéma, loin de là, j'étais également méfiant. Méfiant et impatient. Alors ? Mon avis ?

Le_Mans_66_AfficheEn deux mots ? Courez-y !

C'est un très bon film. J'y suis allé avec des potes, tous passionnés de bagnoles mais bien moins spécialistes du Mans que moi et ils ont adoré. Moi ? J'ai apprécié.

Les images sont superbes, l'histoire, évidemment très romancée, est prenante, les acteurs sont bons même si certaines mimiques versent dans la caricature. Il n’y a pas trop de ces effets spéciaux délirants qui caractérisent le cinéma moderne. C’est un film de facture vraiment classique mais à la très belle photographie. Surtout, il y a des belles caisses partout ! Et ça débute par la magnifique Aston Martin DBR1 de 1959 avec Matt Damon alias Carroll Shelby au volant, il y a pire !

Le_Mans_66_002Le film s’attarde uniquement sur le cas de Ford ce qui est un peu regrettable puisque du côté Ferrari en cette année, il y avait pas mal à dire aussi notamment avec l’exclusion l’avant-veille de la course de John Surtees, son pilote leader par Eugenio Dragoni, le directeur sportif de Ferrari. Mais il est vrai que le « bordel » qui animait cette année-là, la Scuderia, voitures arrivées à la dernière minute, préparation un peu limite, aurait moins mis en valeur le triomphe de Ford. Or c’est un film américain dans toute sa splendeur…

Alors évidemment, Hollywood a fait du Hollywood et en a rajouté des tonnes. La première course californienne de ce film m'a immédiatement fait croire que le film allait être un pensum car elle est filmée avec tous les clichés du genre. Les 24 Heures elles-mêmes n'échappent à cette façon de filmer la course pouvant verser dans la niaiserie totale. Un exemple ? En pleine ligne droite des Hunaudières, la Ford rattrape la Ferrari mais arrivée à sa hauteur la Ferrari reprend un peu de champ. Cela énerve notre ami Christian Bale alias Ken Miles, le fougueux pilote anglais. Il enfonce donc encore plus l'accélérateur et déborde la P3 imparablement. Ben ??? Il foutait quoi notre ami Ken jusqu'à ce moment-là ? Il n'était pas gaz en grand sur une pure ligne droite ?

Le_Mans_66_008On n'échappe pas non plus aux erreurs historiques impardonnables quand on est à ce niveau de budget (100 millions de dollars !!!) et à ce niveau de qualité de reconstitution historique. Je ne donnerai qu'un exemple. Un exemple qui ne spoile pas le film pour ceux d'entre vous qui souhaite y aller mais qui personnellement m'a fait bondir. Nous sommes en 1963 et Lee Iaccoca, vice-président de Ford se rend à Maranello pour négocier avec le Commendatore, le rachat de Ferrari. Les ingénieurs italiens lui font la visite de l'usine, montrant l'assemblage des fameux V12 Colombo, des boites de vitesses. Puis ils passent dans l'atelier compétition. Ou sont préparées de magnifiques Ferrari P3. En 1963... Une voiture apparue seulement en 1966. Là, j'avoue, j'ai lâché un gros "et merde..."

Des approximations, des erreurs volontaires ou involontaires, des contre-vérités, il y en a tout au long du film. Je m'en doutais, j'en avais pris mon parti avant même le visionnage et je vous conseille d'en faire autant si vous connaissez à fond le déroulement de ces années. Ça permet de relativiser et d'apprécier le film pour ce qu'il est : un film et non un documentaire.

Le_Mans_66_006Car il n'en demeure pas moins vrai que les images sont souvent sublimes. Sur ce point-là, j'ai pris un véritable coup à l'estomac notamment à un point précis du film. La reconstitution historique du circuit était le véritable piège puisque les stands historiques ont disparu après les 24 Heures 1990. Tout a donc été reconstitué sur un aéroport californien (bonjour le budget !). Et là, c'est le choc ! C'est parfait ! Oh, j'imagine que ça ne l'est pas forcément à 100% mais l'illusion elle, est parfaite. J'ai été scotché dans mon siège. Même la pente de la ligne droite m'a donné l'illusion d'être là alors qu'un aéroport est rarement incliné... Stands, tribunes, pubs de l'époque dont le fameux bonhomme Esso, l'immense tableau de classement de l'époque, tout y est ! Et rien que pour ça, rien que pour prendre le temps de redécouvrir tout cela, de scruter les détails, j'aimerai bien revoir le film une deuxième fois.

Le_Mans_66_007Même si le reste du circuit est nettement moins crédible (j’ai cru reconnaitre Road Atlanta pour certains virages). Même si le film donne à la course elle-même un duel qu’elle n’a pas vraiment connu, les P3 n’étant pas à même de suivre les MkIIB. Même si le Commendatore ne venait plus sur les courses. Même si Ford a connu deux échecs manceaux avant de triompher et non un seul. Même si les P3 ont un arrière de P4, les Ferrari étant d’ailleurs moins fidèles aux originales que les Ford. Même si l'arrivée de 1966 a eu lieu sous la pluie et non sous une belle lumière ensoleillée de fin d'après-midi. Même si, même si…

Courez-y !