On imagine... Imprimer Envoyer
Mercredi, 18 Janvier 2012 18:10

Fin_Peugeot_908Comme un uppercut bien placé au moment ou un boxeur sous pression tenterait de reprendre l'équilibre...

Avec un groupe automobile qui annonçait vouloir faire 800 millions d'euros d'économie, l'on se doutait bien que la compétition devenait un sujet placé sur la sellette. Pourtant les derniers indices laissaient à penser que Peugeot Sport allait bel et bien poursuivre son engagement en endurance. Une équipe de mécanos venait ainsi de se rendre à Sebring pour des essais qui allaient commencer dans les jours à venir. Des tests avaient été organisés afin de recruter une équipe de pilotes puisqu'il fallait en remplacer plusieurs. On avait de quoi y croire. Pourtant, en ce mercredi 18 janvier 2012, quelques heures avant que les inscriptions au WEC ne soient closes, le personnel Peugeot Sport a été réuni à la hâte. Et Vincent Rambaud, le directeur d'Automobiles Peugeot, leur a annoncé la fin de l'aventure 908. De manière réellement définitive. Il est notamment confirmé que la voiture ne sera pas confiée à une équipe privée pour assurer la présence du constructeur en Sarthe en juin prochain. Comme un uppercut bien placé, le KO est total...

On imagine la détresse du personnel de Peugeot Sport. L'équipe s'appuyait sur un grand nombre de prestataires de service. Qui vont devoir rapidement quitter Vélizy avec probablement quelques incertitudes quant à leurs lendemains... Certains employés (peu nombreux) parmi les anciens, avaient connu l'aventure 905. Sa fin avait été programmé à l'avance, la claque avait forcément été moins brutale.

On imagine aussi la frustration qui doit les habiter. Frustration de laisser un Toyota débutant, seul face à Audi. Cette frustration de ne pas pouvoir tenter d'aller quérir les quatrièmes lauriers manceaux pour la marque au Lion, de rester sur deux défaites d'affilée. On doit avoir beau tenter de se consoler avec les deux titres ILMC, ils n'ont sûrement pas la même saveur qu'une victoire au bout du double tour d'horloge...

On imagine la tristesse des pilotes. Marc Gené a eu la chance et le temps de toucher le Saint Graal en juin 2009 mais Stéphane Sarrazin, Sébastien Bourdais, les deux piliers du début, toujours présents, devront faire sans à moins de pouvoir rebondir ailleurs. Franck Montagny, Anthony Davidson, Simon Pagenaud malgré leur pointe de vitesse indéniable ne triompheront pas pour le Lion. On imagine aussi la cruauté de cette nouvelle pour ceux qui venait d'intégrer l'escouade. Passer, en quelques jours, de la joie d'intégrer une équipe d'usine au coup de massue de voir son programme terminé, doit donner un certain vertige... On imagine aussi que le téléphone d'Hugues de Chaunac doit chauffer...

On imagine le grand coup de spleen des fans. Des fans de Peugeot Sport bien évidemment mais également des passionnés d'endurance en général. On peut être pro-Audi et regretter le départ de Peugeot. Car les courses n'en seront que moins belles, le suspense moins grand. Et les victoires un peu moins savoureuses.

On imagine que le Dr Ullrich n'est pas ravi de cette annonce. Les 908 étaient de sérieuses et très valeureuses rivales à ses chères R18. Il va désormais falloir faire sans « son meilleur ennemi ». La fête sera moins belle, la motivation peut-être un peu moins grande...

On imagine également que Toyota ne doit pas se réjouir de ce départ. La LMP1 nippo-allemande va se retrouver un peu plus dans la lumière, dès sa première participation, avec la pression de devenir l'adversaire numéro 1 d'Audi. Avec beaucoup d'attentes pour donner le spectacle attendu. Pas si facile que cela à encaisser...

On imagine la moue du comptable de l'ACO. Les spectateurs risquent de se bousculer un peu moins aux guichets des 24 Heures en juin prochain... Les bilans risquent de s'en ressentir.

On imagine le choc qu'ont dû ressentir les organisateurs du Championnat du Monde d'Endurance renaissant. Réclamé à corps et à cris par les constructeurs, Peugeot en tête, depuis des années, le voilà à peiné porté sur les fonds baptismaux qu'on le prive d'une jambe ou presque. Pas facile pour apprendre à marcher ! A moins que Toyota ne décide finalement de participer à l'intégralité du WEC, celui-ci encaisse un très, très rude coup...

On imagine l'incrédulité des organisateurs de Sebring. Privés de leurs chères « Pioujo » (prononciation locale), les 60èmes 12 Heures perdent une partie non négligeable de leur attrait. Triste anniversaire...

On imagine aussi quelques rancœurs en Géorgie. Petit Le Mans n'a pas eu droit au label WEC en 2012, au bénéfice d'une manche renaissante au Brésil mais dont on peut douter du succès populaire. L'un des principaux demandeurs de cette course ne sera pourtant plus là...

On imagine l'inquiétude de la planète endurance en cette période si difficile sur le plan économique. Si un groupe automobile de la taille de PSA doit se retirer, on imagine à quel point les privés doivent tirer la langue.

On imagine qu'une telle reculade n'a pas dû être facile à décider pour les dirigeants de PSA. L'image du groupe ne peut qu'en pâtir quelque peu. On avait pressenti que la hausse des budgets vue au Mans en 2011 pouvait avoir des conséquences, on ne pensait pas qu'elles se manifesteraient aussi rapidement, ni aussi brutalement... Que peut-on y faire ? Doit-on instaurer le cost-cap en LMP1 ?

Peugeot se retire. Ciao les 908. Et merci pour tout. On aurait bien aimé vous revoir encore de longues années. Assurément, vous nous manquerez. Même si il n'y a pas mort d'homme, nous sommes tous un peu tristes ce soir...

Laurent Chauveau