François Sicard, OAK : Ce championnat, nous l'espérions... Imprimer Envoyer
Lundi, 06 Juin 2011 06:40

Francois_SicardFrançois Sicard est le patron, toujours souriant, d'une société bien occupée. OAK Racing a en effet engagé quatre voitures en son nom propre et même si la n°49 est confiée à l'équipe DAMS, on imagine l'effort que cela représente pour une équipe privée. Surtout quand à quelques semaines de la course, on connait des accidents tels que ceux enregistrés lors de la Journée Test ou lors des 1000 km de Spa-Francorchamps. Il est aussi le patron d'une équipe engagée en ILMC. A ce titre , il était intéressant de connaître sa réaction quant à la mise en route du Championnat du Monde d'Endurance...


Alors François, quelle est ta réaction suite à cette annonce ?

« Ravis, nous sommes ravis. La création de ce label Championnat du Monde est ce qu'il fallait. Aussi bien pour les teams d'usine que pour les équipes privées telles que nous, afin d'essayer de vendre nos programmes auprès des partenaires. Si tout se met en place correctement, si tout se professionnalise bien, on peut se présenter comme une véritable alternative à la F1 ou au rallye. Donc c'est une vraie bonne nouvelle et ça nous promet un bel avenir pour l'endurance. En nous impliquant en ILMC, c'était notre but et cela arrive au bout de seulement un an, c'est vraiment très bien. »

Ca sera plus facile à vendre...

« Oui parce que ça ne sera pas une Coupe dont le nom est encore inconnu. C'est un titre de Champion du Monde et ça, dans tous les sports, cela parle à tous, c'est clair, explicite. Et je dirai que maintenant en endurance, on aura fromage ET dessert. Parce qu'on aura toujours Le Mans, qui se vend tout seul, mais on pourra y ajouter un Championnat du Monde ! »

De ton côté, as-tu plus d'informations sur la façon dont cela va se dérouler, notamment sur le degré d'implication de la FIA dans l'organisation ?

« Non, pour l'instant, je n'en sais pas plus. Comme vous, nous l'avons appris vendredi dernier et il nous faut attendre jeudi et la conférence de presse de l'ACO pour en apprendre un peu plus. »

Toi qui est au coeur de l'ILMC, de ce que tu peux juger sur les quelques courses déjà disputées, penses-tu que l'on soit prêt à franchir déjà, le pas du Championnat du Monde ? Aussi bien du point de vue organisation que promotion ?

« Il reste beaucoup de choses à faire, notamment sur le plan de la médiatisation du Championnat. J'espère que le label FIA va nous y aider. Mais je le vois bien lorsque nous prenons rendez-vous avec des partenaires, on est encore inexistant. Les gens ont bien le repère du Mans, là pas de souci, mais ils ne connaissent absolument pas l'ILMC. Ceci dit, il faut laisser du temps au temps aussi. Je trouve déjà que les choses avancent vite. Après un an seulement, on a une collaboration entre l'ACO et la FIA. Mais il est vrai qu'il reste beaucoup de choses à construire. »

Tu attends quoi exactement du promoteur ?

« Pour nous, ce qui est crucial, c'est l'exposition médiatique. Sans cela, on n'a pas de partenaire, c'est simple. Et ça passe avant tout par la télé, il n'y a pas de secret... »

Ce que fait Eurosport cette saison n'est pas suffisant ?

« C'est déjà bien, il faut le reconnaître. Mais on voit bien que l'on n'a pas l'exposition nécessaire. Sans vouloir se comparer avec la F1 qui occupe le terrain depuis 30 ans, il faudrait au moins que l'on soit au niveau du WRC ou du MotoGP. »

Tu penses que ce produit peut permettre de regagner le terrain perdu ?

« Oui, je le crois. Car c'est une discipline qui jouit d'une proximité avec le public. Il y a des enjeux autres que celui de la technique. Il y a des enjeux humains notamment. Le travail des ingénieurs, les choix de stratégies, le travail des mécaniciens, il y a beaucoup de belles histoires à raconter, à faire vivre. Après, je sais qu'il n'est pas forcément facile de produire en télé une course de 6 heures, 12 heures ou 24 heures. Mais il y a plein d'aspérités qui passionne les gens, qui sont chaleureuses, qui mériteraient d'être racontées et qui devraient intéresser les grandes chaînes. »

Tu crois encore au possible retour du sport auto sur les grandes chaînes de télé au moment ou le sport en général ne connait plus le même « amour » télévisuel qu'il y a simplement 10 ans ?

« Je pense en tout cas que notre discipline mériterait une meilleure couverture dans des émissions telles qu'Auto-Moto ou Turbo. C'est autant valable pour les constructeurs que pour nous. »

Là, c'est un constat franco-français. Est-ce du même ordre sur les télés étrangères ?

« C'est assez général. Quand on en discute avec nos adversaires, ils ressentent la même chose. Et nous le voyons bien, nous-mêmes, quand on se déplace à l'étranger. Mais je ne veux surtout pas tirer sur les promoteurs. Ce n'est pas facile. Le téléspectateur est bien plus sollicité qu'il y a 30 ans et que ce soit pour une manifestation sportive ou artistique, c'est bien plus dur d'exister... Même pour le promoteur d'un bel événement, ce n'est pas facile de trouver un petit bout de télé... Et je pense que les teams et les constructeurs peuvent aussi avoir un rôle aux côtés des promoteurs dans le développement de ce championnat. »

Dans tous les cas, cela signifie qu'OAK Racing s'impliquera dans ce Championnat du Monde ?

« Oui. C'était notre but à Jacques Nicollet et moi-même en faisant le premier pas de l'ILMC, nous l'espérions et nous l'avons. Nous irons. Ce que l'on peut aussi espérer d'un tel championnat, c'est qu'il attire de nouveaux constructeurs et il est évident que c'est le but d'une entreprise comme la notre de pouvoir tisser un tel partenariat. En s'appuyant sur un constructeur qui souhaite faire Le Mans, y briller en s'appuyant sur une structure existante. »

Sans vouloir trahir le moindre secret ou même donner des noms, parvenez-vous à nouer des relations avec des constructeurs ?

« Oui, des contacts, on en a eu un certain nombre. On en avait eu un qui avait bien démarré avec Mazda. Malheureusement, la crise n'a pas permis à Mazda de fêter dignement les 20 ans de sa victoire au Mans par le biais d'un engagement en LMP1. Nous avons des contacts qui n'ont pas abouti, d'autres qui démarrent mais de toute façon, c'est une entreprise de longue haleine. Ce qui peut nous aider aussi, c'est la volonté de l'ACO d'ouvrir la course aux nouvelles technologies. Les constructeurs ont réellement besoin de communiquer autour de cela et là, ils vont avoir un moyen de le faire via ce championnat. »

Passons maintenant à ces 24 Heures qui s'annoncent. Comment s'est passée la préparation de cette course avec les évènements de la Journée Test et de Spa ?

« Elle a été houleuse, évidemment. La sortie de la n°24 au Mans et celle de la n°15 à Spa nous ont donné beaucoup de travail supplémentaire. Mais nous sommes prêts ! Bon, il n'aurait pas fallu que les vérifications aient lieu une journée plus tôt car nous ne l'aurions pas été... Mais les quatre voitures sont là. Nous avons essayé de les rendre aussi belles que possible, je pense que c'est le cas. On a des chances de faire les choses bien. Maintenant, nous sommes dans la situation du marathonien qui se prépare durant trois mois et qui ne découvre réellement ou il en est que le jour de la course. Nous, ce n'est pas 42 km que nous avons à faire mais 24 Heures. Nous verrons bien ou nous en sommes exactement. »

Ou en êtes-vous au niveau des coques carbone ? Vous en avez encore en stock au cas où ?

« Non, là, on n'a plus de coque prête. Nous avons utilisé celle de la voiture d'essais pour remplacer celle de la n°15. Nous avons une coque toute neuve mais elle est brute, absolument pas équipée. Mais de toute façon, j'espère que nous avons laissé notre chat noir dans les Ardennes, dans la descente avant Pouhon, derrière le rail et que maintenant, on avoir une épreuve un peu plus sereine même si aligner quatre voitures, on sait que c'est beaucoup de travail... »

Il y a une consigne de prudence du coup vis-à-vis des pilotes pour les essais ?

« De toute façon, il faut toujours aborder Le Mans avec beaucoup de calme et de sérénité. C'est une course complètement différente des autres de par sa longueur. En arrivant ici, l'objectif, c'est Dimanche 15 Heures. On sait que les essais sont importants pour bien mettre la voiture au point mais on sait aussi que la position sur la grille est d'une importance très relative. Donc il est clair que l'on ne va pas se pendre pour sortir un chrono d'outre-tombe. »

Laurent Chauveau