Philippe Sinault : "Nissan est en colère !" Imprimer
Dimanche, 24 Avril 2011 07:10

th_Oreca_SignatechAprès de beaux débuts à Sebring, malheureusement mal récompensés suite à un petit ennui électronique de commande de boite de vitesses, l'équipe Signatech était attendue au tournant de la Journée Test en tant que représentant officiel de Nissan en LMP2. Deux Oreca 03 avaient été invitées par l'ACO mais finalement, il y a quelques jours, nous apprenions que seule la n°26 serait finalement engagée lors des 24 Heures du Mans. Entrée en matière étonnante pour un concurrent officiel. Philippe Sinault, le team manager de l'équipe a bien voulu revenir sur cette question mais également sur le cas HPD, un sujet sur lequel bien peu de gens ont accepté de s'exprimer officiellement...

Philippe, tout d'abord, sur quel bilan restez-vous après les 12 Heures de Sebring ?

« Des regrets dans la forme mais pas sur le fond. Nous obtenons la deuxième place en P2, nous étions rapides, de ce point de vue, c'est satisfaisant. Mais, nous perdons 43 minutes aux stands ce qui nous fait plonger dans les profondeurs du classement. On a un peu de chance puisque la voiture qui nous précède ne participe pas à l'ILMC donc nous faisons le plein de point. Je résumerai en disant mission accomplie même si je suis terriblement frustré sur la forme... »

Suite à ces 12 Heures et à la course du HTTT, l'ACO vient de décider de redonner un coup de pouce au moteur V6 turbo HPD en augmentant la taille de ses brides. Qu'en pensez-vous à titre personnel ?

« C'est la question piège... Je vais essayer de rester objectif. Un, c'est prématuré. L'ACO s'était engagée à attendre un peu plus longtemps. Deux, cela s'est fait réelle concertation et je trouve cela un peu dommage. Trois, on s'est concentré sur l'aspect performance alors que pour moi, ce n'est pas forcément le réel problème. Après, nous jugerons sur les faits. Mais en tout cas, moi, j'ai fait le choix de cette catégorie là en pensant que nous n'entrerions pas dans un système ou l'on compense les performances. Nous, Nissan et Nismo, nous avons fait le choix d'un package en étudiant au mieux l'équation à remplir et si nous ne sommes peut-être pas encore optimal mais on n'est pas loin du but. Honda, d'après leurs dires, s'est un peu trompé. Soit mais pourquoi devrions-nous en payer les conséquences ? Alors que l'on réajuste un petit peu, pourquoi pas ? Mais on doit d'abord en discuter. Et puis réajuster d'autant, je pense que cela n'est pas très bien. D'autant que je pense que le problème n'est pas la performance. »

th_Philippe_SinaultQu'en pensent les gens de Nissan et Nismo ?

« Ils sont fous de rage. J'ai lu le courrier que les japonais ont envoyé à l'ACO et connaissant la culture japonaise, pour qu'ils envoient un tel mot, c'est vraiment qu'ils sont en colère. »

Et vos propres relations avec Nismo, il n'y a plus qu'une seule voiture engagée au lieu de deux, que s'est-il passé ?

« Nos relations sont toujours très bonnes et cela doit être la traduction du partenariat très serré avec eux. Lorsque nous nous sommes liés à Nissan, ils ne s'étaient pas engagés à 100% concernant le financement de la seconde voiture. Suite aux incidents récemment survenus au Japon, ce financement ne pouvait plus passer uniquement par Nissan mais également par des partenaires autours de Nissan et ce n'était plus le moment opportun pour cela. De plus, étant donné la nature du drame qui se noue là-bas, l'entreprise n'a pas forcément le cœur à faire la fête. Ils tiendront leurs engagements. Il y aura par exemple des opérations destinés à mettre en valeur leur politique commerciale. Mais dans le contexte actuel, pour un retour, il valait mieux faire profil bas et ne pas engager cette deuxième voiture. »

Vous m'aviez parlé de l'aspect marketing de cette liaison entre Nissan et vous. Qu'en est-il aujourd'hui de manière concrète ?

« Cela passe par l'engagement de Lucas Ordonez, le pilote issu de la GT Academy donc c'est un garçon qui ne se destinait pas forcément au métier de pilote de course. L'opération consistait donc à faire passer un jeune homme du canapé de son salon devant sa Playstation jusqu'au volant d'un prototype. Du virtuel au réel. »

Et à Sebring, cela ne s'est pas trop mal passé...

« Cela s'est très, très bien passé ! »

Pour en venir à cette Journée Test, quels sont vos objectifs ?

« Tout d'abord qualifier Lucas qui doit faire ses 10 tours. Puis prendre le temps de valider le kit Low Downforce (appuis faibles). Il faut rester sage, ce n'est pas les 24 Heures du Mans, c'est simplement la Journée Test et je ne cesse de le répéter à mes pilotes... »

Au vu de la réaction des nombreux interlocuteurs que j'ai interrogé sur le moteur HPD, c'est un sujet brûlant. Certains ne veulent même pas l'évoquer à mots couverts, d'autres demandent que l'entretien demeure « Off » comme on dit. Quant aux ingénieurs HPD, la phrase qui revient sans cesse est : « je ne peux faire aucun commentaire sur ce sujet. » Philippe Sinault n'a pas hésité, qu'il en soit remercié...

Laurent Chauveau