Audi Sport, Ullrich Baretzky "Fiabiliser le V6 n'a pas été facile..." Imprimer
Vendredi, 25 Mars 2011 20:56

Ullrich BaretzkyIl s'appelle Ullrich, comme le patron. Mais il s'agit de son prénom, pas de son nom. Ullrich Baretzky, le patron des moteurs chez Audi Sport. Comme son patron, il s'exprime en français. Comme son patron, il est affable et ouvert. Il est toujours agréable d'avoir une conversation avec lui. Agréable et intéressant... D'autant plus que pour sa nouvelle R18, Audi Sport a fait un choix différent de celui de son concurrent dans le domaine du moteur. Là ou Peugeot a conçu un V8 diesel, Audi a fait le pari d'un V6. Explications...

Peugeot Sport a fait le choix de rester sur une cylindrée unitaire très proche de celle connue sur leur V12. De votre côté, vous aviez déjà augmenté cette valeur avec le V10 de la R15 comparé au V12 de la R10 (20%). Mais vous l'augmentez encore (de 12%) en passant au V6 sur la R18. Pourquoi ce choix ?

« Il y a plusieurs raisons et je vais vous en donner deux. Première raison, nous voulions un moteur relativement court. Tout d'abord, pour pouvoir éventuellement jouer avec l'empattement en fonction de la poursuite du projet. Ensuite, lorsque nous l'avons lancé, nous ne savions pas encore si nous utiliserions des technologies hybrides. Un moteur court nous donnait plus de latitudes pour placer les éventuels éléments dont nous pourrions avoir besoin.

Deuxième raison, c'est une tradition pour Audi Sport de faire du développement qui puisse aussi s'adapter par la suite à la production de grande série. La tendance actuelle dans la série, étant aux moteurs plus petits, automatiquement, la performance par cylindre doit augmenter. Avec un V6 3,7 litres, on se doit de trouver des solutions malgré des conditions d'utilisation plus sévères. Nous avons donc été obligés de développer des technologies nous permettant de maitriser les pressions de combustion. »

Justement, c'est là l'argument utilisé par Peugeot Sport pour justifier le fait de rester sur un V8. Les pressions de combustion restent contrôlables. N'est-ce pas difficile à maîtriser ?

« Si, si, nous l'avons appris à nos dépens au cours du projet... »

Avec le moteur de la R18 ou déjà avec le V10 de la R15 ?

« Non, non, avec celui de la R18. En fait, nous le savions dès le début du projet que nous connaitrions des problèmes de mise au point car le pari était ambitieux. Mais je suis très fier de pouvoir dire que maintenant, nous avons appris à maitriser cela, même si je dois conserver une certaine mesure. Je comprends très bien pourquoi Peugeot a choisi cette voie et nous aurions pu en faire de même lors du lancement du projet. Nous l'avions d'ailleurs évoqué entre nous. Mais nous avons choisi une autre solution. Pour les raisons que je vous ai données. Et pour d'autres que je ne vous donnerai pas ! (Hilare !) »

Il vous a fallu du temps pour résoudre ces problèmes ?

« Notre V6 a tourné au banc pour la première fois juste après Le Mans 2010, soit bien après le moteur Peugeot. Et nous n'avons plus de problème depuis quelques se..., euh quelques mois (amusé...) »

Audi R18 Evolution_2 Tests SebringOn dit que cette architecture serait plus favorable sur le plan thermodynamique ?

« Ca, c'est impossible à dire. Trop de paramètres diffèrent d'un moteur à l'autre, du V10 au V6 par exemple, pour pouvoir être affirmatif sur ce sujet. Je ne peux pas répondre à cette question. »

J'imagine que vous ne donnerez aucun chiffre mais développe-t-il déjà le niveau de puissance auquel vous vous attendiez lors du lancement du projet ?

« Il développe plus de puissance que le V10 de la R15++ ! (Rires) »

D'accord mais est-ce à quoi vous vous attendiez ?

« Oui, on l'a déjà eu. »

L'œil facétieux du personnage en dit long. Inutile de poser des questions plus précises sur l'architecture moteur, on sait que l'on n'obtiendra guère plus de détails. Turbo au centre du V ou pas, cela reste encore une énigme même si certaines clés laissent à penser que c'est une possibilité.

Depuis cette interview réalisée la veille de la course, on a vu des R15 embêter sérieusement les 908 en course. Or la R15 en version 2011 est, aux dires de Baretzky, moins puissante que la R18. Et l'on a vu deux R18 évolution 2 (si, si déjà une évo 2...) passablement modifiées limer le béton de Sebring juste après la course. Deux voitures que l'on s'était bien gardé de montrer à la presse lors de la semaine de course... Les rumeurs donnent déjà des chronos inférieurs à celui de la Pole de la 908 : 1'45"7 pour la R18 contre 1'46"6 à Sarrazin. Cela va vite, très vite et longtemps puisque l'on parle de milliers de kilomètres parcourus lors de ces tests de Sebring.

Reste à savoir à quel point Peugeot Sport en a encore sous le pied tant il est probable que l'équipe de Vélizy n'a pas tout dévoilé lors de la course. Histoire de ne pas attirer l'œil de l'ACO sur l'équivalence essence-diesel ou bien même sur celles nivelant les performances entre LMP1 2011 et LMP 2010... Bref, si la R18 semble très bien née, il est encore impossible de tirer la moindre conclusion quant à son niveau de performance face à la 908.

Si l'on n'a pas de certitude sur ce point précis, on peut presque en avoir sur un autre. La course à l'armement entre les deux va de nouveau creuser très naturellement l'écart avec les privés. Les deux autos, 908 et R18, sont neuves et pourtant, elles subissent déjà des évolutions majeures. Car à Monza ces jours derniers, l'avant de la 908 a très sérieusement changé par rapport à celui vu à Sebring ! Quelles écuries privées pourraient bien avoir les moyens de suivre un tel rythme d'évolution ? Et, pour jouer avec ces deux constructeurs, ne comptons pas trop vite sur Aston Martin Racing. Il semble en effet, que la AMR-One, encore toute jeune, doive composer avec un moteur fragile...

Laurent Chauveau

Audi R18 Evolution_2 Tests Sebring Audi R18 Evolution_2 Tests Sebring Audi R18 Evolution_2 Tests Sebring Audi R18 Evolution_2 Tests Sebring
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